Cher Gary,
Le temps est venu. Le temps est venu de regarder la vérité en face et de réparer les pots cassés. Votre plan, que je qualifierai d’ambitieux d’exporter notre sport national vers la « sun belt » américaine est à la croisée des chemins.
Je serai bon joueur et je dirai d’emblée que le bilan de cette expérience est mitigé. Les marchés du sud qui connaissent un certain succès, comme les Kings, les Ducks et les Sharks, ont toutes été fondées avant votre arrivée à la tête de la LNH. Depuis que vous êtes en poste, soit depuis la saison 1992-93, les nouvelles équipes qui sont apparues via l’expansion ou par le biais de transferts ne roulent pas sur l’or. Le Wild du Minnesota se tire bien d’affaire car le marché est là. Après tout, le Minnesota est The State of hockey. Mais après ça, le bilan se gâte.Les Hurricanes de la Caroline survivent, les Blue Jackets de Columbus vivotent, les Prédateurs de Nashville ont connu leur lot d’incertitudes, les Thrashers d’Atlanta sont partis et les Coyotes de Phoenix sont… dans une situation inexplicable.
Les gens de Québec clament qu’ils méritent leur équipe. Qu’ils sont prêts. Ils ont la passion, les futures installations et un propriétaire prêt à injecter les sommes demandées. D’un côté, vous avez une équipe sur le respirateur artificiel depuis plus de quatre ans maintenant. De l’autre, toutes les conditions gagnantes sont réunies. Que vous faut-il de plus? L’économie, me répondrez-vous sans doute. Et je ne vous en porte pas rigueur. Après tout, le hockey n’est pas qu’une histoire de cœur, c’est aussi une histoire de gros sous. Mais vous devez réaliser une chose. L’économie est là.
Un article du 28 novembre 2012 de NHL Numbers, citant le magazine économique Forbes, sous la plume de Jonathan Willis le confirme, les équipes canadiennes sont toutes profitables. Des Canadiens aux Sénateurs, en passant par les Flames et les Oilers. Dans la langue de Shakespeare, on peut y lire : All seven (canadian) teams are at least eight figures in the black.
Vous avez besoin de quelques données sur la ville de Québec? Des chiffres de l’Institut de la Statistique du Québec donnent un taux de chômage de 4,8% pour la région de la Capitale Nationale, en baisse de 0,9%. Petite parenthèse, selon Statistiques Canada, le taux de chômage de Winnipeg se situe à 5,9%.
N’ayez crainte, je ne m’improviserai pas économiste, je n’en suis pas un. Je suis un fan de hockey qui parle avec ses trippes, mais qui constate également que la farce a assez duré. Une ligue qui demeure propriétaire d’une de ses équipes pour quatre ans est symptomatique d’un problème qui ne peut pas se régler dans le statu quo.
L’expérience de Winnipeg devrait vous rassurer, M. Bettman. Les petits marchés passionnés et solides économiquement sont viables pour votre industrie, en plus d’être une excellente source de revenus, ce que les Coyotes de Phoenix n’ont jamais été. Oui, Québec serait le deuxième plus petit marché du sport professionnel en Amérique derrière Green Bay. Mais ne vaut-il pas mieux une ville de 700 000 habitants (environ) qui donnerait des assistances de 15 000 personnes (et 18 000 dans le nouveau Colisée), qu’un marché de plusieurs millions qui peine à attirer 10 000 spectateurs pour un match?
Alors allez-y, M. Bettman, lâchez-prise. Faites d’une pierre deux coups en admettant votre défaite et en rendant à une ville fière son équipe depuis trop longtemps disparue. À moins que votre égo ne soit sacrément plus gros votre sport et que ses fans. Si tel est le cas, nous serons tous perdants, vous y compris…
Bien à vous.
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