"Bien que cet animal (le coyote) soit chassé avec acharnement, il se rencontre jusque dans les banlieues des villes américaines. Ils se sont adaptés à fouiller les poubelles et à manger des animaux domestiques." - Extrait de Wikipédia
Voilà, je me lance. Voici ma première chronique sur ZN. J’espère que vous serez indulgents car d’habitude, j’écris sur des sujets un peu plus plats comme les conflits d’intérêts.
Le titre de cette chronique vise à illustrer la différence marquante, sinon gigantesque, entre le dossier actuel des Panthers à Broward County et le célèbre dossier d’anthologie qu’était celui des Coyotes à Glendale.
Je vous propose donc une série de trois (3) chroniques qui vous replongera au cœur même de la saga des Coyotes. La présente chronique jettera un regard sur le dossier des Coyotes à compter de la faillite de l'équipe en 2009 jusqu'à sa vente à Ice Arizona en août 2013. La deuxième chronique portera sur l’histoire des Panthers jusqu'à la demande d'allégement faite au comté de Broward au début de l'année 2014, alors que la dernière chronique consistera en une analyse de la situation actuelle des Panthers dans le merveilleux comté de Broward.
Pourquoi revenir comme ça dans le passé si douloureux de cette saga des Coyotes qui nous a tenue en haleine durant tout le printemps et le début de l'été 2013 ? Car je suis de ceux qui croient que pour bien comprendre ce qui se passe aujourd’hui, il faut se souvenir de ce qui s’est passé hier.
Débutons par un peu d’histoire…
Les procédures de faillite
Comme plusieurs le savent, la LNH est devenue propriétaire des Coyotes en 2009. Elle avait dû acheter la franchise des mains du syndic à la faillite de l’équipe suite au dépôt du bilan par l’ancien propriétaire de l’époque Jerry Moyes. Certains se souviennent des détails ayant donné lieu à cette achat inusité de l'équipe par la LNH, mais pour mémoire, rappelons qu'il avait été rendu nécessaire afin de bloquer la vente de l’équipe à Jim Balsillie, propriétaire à l'époque de Blackberry, lui qui voulait déménager la franchise à Hamilton.
En début 2009, Moyes, qui essuyait des pertes astronomiques année après année à Glendale, avait conclu une transaction avec Balsillie afin de lui vendre les Coyotes pour une somme de 212 millions. Ce dernier avait l'intention de déménager l'équipe à Hamilton afin qu'elle évolue dans le Copps Coliseum. La LNH s’était bien évidemment opposée à la vente entre Moyes et Balsillie, ce qui avait forcé Moyes à mettre les Coyotes en faillite. La LNH s’était initialement objectée à cette faillite, arguant que Moyes aurait dû remettre le contrôle de l’équipe à la ligue conformément aux Règles et Statuts de la LNH et qu'une équipe ne pouvait faire faillite sans l'aval de la ligue. Cet argument avait été rejeté à l’époque par le juge Redfield T. Baum, chargé de l'affaire, ce qui avait forcé Bettman et la LNH à intervenir dans les procédures de faillite afin d’éviter que l’équipe soit vendue à Balsillie et déménage à Hamilton.
Dans les procédures de faillite, la LNH invoqua qu'à titre de ligue privée, elle était en droit de choisir ses propriétaires et l’endroit où ses équipes jouaient, conformément à sa constitution et ses statuts. Cette fois-ci, le juge Baum donna raison à la LNH et imposa comme condition à la vente de l'équipe que la LNH devrait préapprouver le nouveau propriétaire ainsi que, le cas échéant, l'endroit où l'équipe évoluerait.
Voici comment le juge Baum décida de régler le sort de la vente des Coyotes. Il ordonna 2 ventes aux enchères. L’une devait se dérouler le 5 août 2009 et n’était ouverte qu’aux acheteurs qui seraient prêts à s’engager à garder les Coyotes à Glendale. La deuxième vente aux enchères était prévue pour le 10 septembre 2009 et ouverte à tous, incluant ceux qui voudraient déménager l’équipe. Bien évidemment, cette deuxième enchère ne serait nécessaire qu’au cas où aucune offre acceptable n’aurait été déposée dans le cadre de la première enchère.
Lors de la première enchère, deux (2) acheteurs potentiels firent des offres. La première offre de 148 millions $ provenait de Jerry Reinsdorf. La deuxième offre, au montant inconnu, provenait de Ice Edge Holdings (Leblanc et cie…) Les 2 offres assuraient le maintien des Coyotes à Glendale mais celle de Ice Edge stipulaient que 5 parties locales seraient jouées à Saskatoon contre les équipes canadiennes de la LNH.
La LNH, qui devait au préalable, avaliser la candidature des offrants, rejeta celle de Balsillie, ne prit pas position sur celle de Ice Edge et accepta celle de Reinsdorf et son groupe ainsi que son offre de 148 millions$. Petite anecdote : dans son refus de la candidature de Balsillie, la ligue indiqua que ce dernier n’avait pas la personnalité et l’intégrité requise par les propriétaires de la LNH afin d’intégrer sa ligue, conformément à la règle 35 de ses règlements.
La ligue demanda deux (2) reports de la première enchère prévue initialement pour le 5 août 2009, alléguant dans sa deuxième demande de report que le délai pour valider les candidats offrants était trop court et qu’il serait mieux d’attendre la fin de la saison 2009-2010. Le juge Baum ne fut pas ému par cette demande et ordonna que l’on procède à la première enchère le 10 septembre 2009. Compte tenu de l’incapacité pour Reinsdorf de finaliser un nouveau bail avec Glendale pour le Jobing.com, il retira son offre initiale. Quelques semaines plus tard, Ice Edge fit de même et se retira.
Quand il devint évident qu’aucun autre acheteur potentiel ne se manifesterait, la ligue déposa une offre d’achat de 140 millions $ pour l’achat des Coyotes, soit bien en deçà de l’offre de 212 millions $ de Balsillie.
Face à cette offre, Balsillie déposa une offre bonifiée de 242 millions dont 50 millions$ étaient destinés à la ville de Glendale. Le juge rejeta l’offre de Balsillie puisqu’elle prévoyait que la vente des Coyotes devait se faire libre de toutes objections et oppositions de la part de la LNH et libre des obligations découlant du bail entre les Coyotes et Glendale pour l’aréna.
Cependant, le juge rejeta également l’offre de la LNH puisqu’elle se déchargeait de certaines des obligations du failli, notamment de certaines dettes dues à Moyes et Gretzky, ce qui était inéquitable aux yeux du juge. Par contre, le juge indiqua dans son jugement comment la LNH pouvait contourner ce problème et présenter une offre valable.
Achat des Coyotes par la LNH: Une ancre dans le désert de 700 millions $
Puisqu’aucun autre acheteur potentiel ne démontra d’intérêt pour les Coyotes dans le cadre de la première enchère, la LNH déposa une nouvelle offre de 140 millions $ avec une distribution plus équitable entre les différents créanciers. Cette offre prévoyait également, et c'est un point majeur, que la LNH assumerait l'entièreté des obligations du failli aux termes du bail pour la location du Jobing.com qui était valide jusqu'en 2035. N’oublions pas que le fameux Jobbing.com avait été construit à grands frais par la Ville à coûps d'obligations émises par celle-ci, le tout afin d’attirer cette équipe qui jouait jusqu’en 2003 dans la ville de Phoenix au America West Arena (aujourd’hui le US Airways Center). Ce ne serait pas la dernière fois que Glendale tomberait dans le piège de la LNH et ses promesses de Klondike.
Cette offre fut avalisée par le juge Baum et c'est comme ça que la LNH devint le 30e propriétaire de sa propre ligue.
Et voici ou tout cela devient fort intéressant et instructif. Ce bail nouvellement assumé par la LNH pour la location du Jobing.com, contenait une clause pénale qui prévoyait qu’en cas de déménagement des Coyotes avant la fin du bail, le propriétaire de l’équipe verserait une pénalité à la ville de Glendale à titre de dédommagement. Cette clause pénale dégressive représentait 700 millions de dollars au moment de la signature du bail en 2003 et probablement quelques 560 millions en 2009. Cette clause pénale laissait donc un goût amer dans la bouche de la LNH malgré sa victoire devant le tribunal de faillite de l’Arizona. En effet, elle avait réussi à se débarrasser de Balsillie, mais ce faisant, elle engageait sa responsabilité aux termes d’un bail comprenant une clause pénale très onéreuse. Voici donc mes amis la raison principale de l'entêtement de Bettman, que plusieurs qualifie d'incompréhensible, à garder les Coyotes dans le désert de l'Arizona...
Le COG de Glendale, Joyce, Maria, Ken, Gerg, Dave, George, Anthony, Darrell et les autres
L'achat de novembre 2009 ne changea pas le fait que l’équipe continuait de perdre de l’argent, soit environ 20 à 30 millions $ par année. La ligue, déterminée à ne pas assumer ces pertes, étant déjà elle-même créancière de l’équipe pour plus de 35 millions, se tourna vers Glendale afin d’obtenir les fonds nécessaires à éponger les déficits. En retour, Bettman s’engageait à trouver un acheteur qui garderait l’équipe à Glendale. C’est dans cette foulée que Glendale accepta de verser 25 millions $ par année à la LNH pour opérer les Coyotes. Il s'agit de la deuxième raison derrière l'entêtement de Bettman à garder les charognards à Glendale.
Pour la petite histoire, notez que cette « subvention » de 25 millions $ avait été extorqué de la ville au printemps 2010 sous la menace d’un déménagement de l’équipe à Winnipeg. En effet, la LNH avait convenu avec True North Sport n Entertainment inc. d'une stratégie afin de convaincre les élus de Glendale qu'elle avait l'intention de déménager les Coyotes de Phoenix dès 2010 à Winnipeg. True North avait cependant accepté de jouer ce rôle ingrat de « bouton à pression » en échange d’un engagement de la LNH de lui octroyer une équipe de la LNH dès que possible.
Mark Chipman avait bien négocié son affaire et pour cause puisqu’il s’agissait de la 3e fois qu’il engageait des discussions avec des équipes de la LNH pour un déménagement à Winnipeg. La première fois était en 2007 et concernait les Prédateurs de Nashville et la deuxième, en 2009, concernait les Trashers. Déterminé à ne pas se retrouver le bec à l’eau encore une fois, Chipman obtint de Bettman une forme de garantie d'équipe, ce dernier n'ayant eu d'autre choix que d’acquiescer afin de disposer d’une menace sérieuse dans sa négociation avec Glendale. C’est dans ce contexte que le CoG se fit avoir pour la 2e fois par la LNH. Cette subvention coûta la modique somme de 75 millions à la Ville.
Par ailleurs, Chipman, fort de l'engagement de Bettman, et ayant déjà discuté jadis avec les proprios des Trashers, conclut avec Atlanta Spirit, propriétaire de l'équipe, une entente de principes qu'il présenta à Bettman pour approbation. Et c'est dans ce contexte que les Trashers déménagèrent à Winnipeg en mai 2010, au grand dam des gens de Québec qui croyait que cette équipe aboutirait peut-être chez nous.
Les Coyotes bénéficiaient donc d'un sursis à Glendale, en attendant qu'un acheteur daigne se manifester. S’en suivit le cirque que l’on connait afin de trouver un propriétaire pour sauver les Coyotes à Glendale avec en tête d’affiche les personnages nommés ci-avant. Jamison, Leblanc, Gosbee, Jones, Zorn, Fallar, Clark, Alvarez, Sherwood, Chavira etc…
Here to stay…for 5 years…
Cette saga culmina vers ce soir fatidique du 2 juillet 2013 durant lequel le CoG (Council of Glendale, l’équivalent de nos conseils municipaux) vota 4-3 en faveur d’une proposition qui prévoyait que le nouveau locataire du Jobing, le Groupe Renaissance, renommé par la suite Ice Arizona, bénéficierait d’une subvention annuelle de 15 millions $ de la Ville en échange d’un partage de revenus avec celle-ci sur certains revenus connexes comme les frais de stationnement ainsi qu’une surcharge sur les billets vendus.
La proposition prévoyait également une clause de sortie pouvant être exécuté uniquement par Ice Arizona dans une fenêtre s’ouvrant au terme de la 5e année du bail si l’équipe démontrait des pertes supérieures à 50 millions$.
L’équipe fut donc vendue en août 2013 par la LNH à Ice Arizona pour une somme de 170 millions$, somme provenant en grande partie de la compagnie Fortress, groupe financier prêtant à des taux élevés. De plus, il semble que la LNH avança un montant important (85 millions) à l’équipe afin que celle-ci puisse éponger les déficits durant les premières années (5?).
Trompe-moi une fois, honte à toi, trompe-moi une seconde fois, honte à moi, trompe-moi une 3e fois, que le diable m'emporte...
Comment une ville surendettée comme Glendale pouvait-elle avoir acceptée cela? C'est inexplicable pour le commun des mortels. Tout comme il est louche que le pompier retraité Sammy Chavira, "chavira" du côté des Pro-Coyotes alors qu'il avait fait campagne contre Joyce Clarck et contre toute forme d'aide aux Coyotes. À noter qu'à l'époque du vote, la maison de Chavira faisait l'objet d'une vente forcée par un syndic de faillite suite au non-paiement de l'hypothèque de 180 000$. L'histoire ne dit pas comment Chavira s'en est sorti mais ce retournement de veste simultanément avec ses problèmes financiers laisse planer un doute sur toute l'affaire.
Par contre, levons notre chapeau à Gary Bettman, qui réussit à mystifier tout le monde en sortant la LNH d’une situation contractuelle problématique, pour ne pas dire catastrophique tout en donnant l'impression qu'il sauvait un marché auquel il prétendait tenir. Désormais, Ice Arizona était la seule entité liée contractuellement avec Glendale et la clause pénale de 700 millions venait de disparaitre comme par enchantement.
Quant à Leblanc, Gosbee, Jones et les investisseurs venus du Nord, ils pouvaient tous dormir tranquille : leur argent était en sécurité avec cette clause de sortie et les 85 millions$ de la ligue…à suivre
(Partie 2 : Les Panthers, une équipe dégriffée…)
Commentaires
trop bon tu nous fais patienté comme l'attente interminable des nordiques
Tu mentionnes que True North discutait avec le proprio d'Atlanta. Est-ce que l'on sait si Québécor discute actuellement avec le nouveau proprio des Panthères?
Merci et j'ai bien hâte de lire la suite!
C'est pour quand ?
Encore Bravo et je comprend maintenant tout.
Tout un résumé!
ça m'a rappelé toutes les étapes de cette saga interminable qu'on suit depuis des lunes.
Félicitation encore